Un prix plafond et une alternative contraire

Par Olivier Gélinas, Analyste Financier, Contributeur pour DayTrader Canada

Ce lundi, le G7, l’Australie et l’Union Européenne dans son ensemble ont annoncé une nouvelle mesure contre la Russie. Le mouvement de découragement militaire dont font preuve divers pays a franchi une nouvelle étape, empêchant la Russie de profiter de son pouvoir sur le pétrole à travers ses actes envers l’Ukraine. Ces nouvelles mesures montrent une fois de plus à quel point le pétrole demeure aujourd’hui une nécessité pour nos économies, et l’urgence d’opter pour une source d’énergie alternative. Alors que plusieurs pensent notamment à l’électricité, d’autres joueurs misent sur une source complètement différente.

L’alliance des grands pays développés a dévoilé plus tôt cette semaine une nouvelle contre-mesure des actes de guerre venant de la Russie. Encore une fois, ces mesures visent le pétrole russe. Comme la Russie s’inscrivait comme le 2e plus grand producteur de pétrole au monde, moyennant 13.1% de la production mondiale, un coup d’épée additionnel dans cet influx monétaire à l’économie aura nécessairement des répercussions. Le regroupement impose maintenant un prix maximal sur le baril de pétrole russe. Aucun cargo ne prendra la mer si le prix d’achat par baril dépasse le 60$. Cette mesure s’ajoute aux embargos du Canada, des États-Unis, du Japon et du Royaume-Uni. À titre indicatif, le baril russe se transigeait à 64$ vendredi dernier.

Cette dernière mesure veut avant tout empêcher la Russie de profiter de son mouvement de guerre contre l’Ukraine de par des prix du baril de pétrole élevé, finançant par la bande ces mouvements. De son côté, la Russie dit ne pas accepter ces nouveaux tarifs et les refusera catégoriquement, même si cela implique une baisse de la production. Évidemment, cette mesure demande à faire ses preuves. Les autres pays utilisant le pétrole russe ne sont pas dans l’obligation de se conformer à ces tarifs et peuvent être amenés à négocier avec la Russie de cette nouvelle position de force.

Toutefois, comme noté dans un billet il y a quelques semaines, les pays européens détiennent un lien de dépendance fort au pétrole russe. La Lituanie importe près de 83% de son pétrole du pays fautif, 80% pour la Finlande et 74% pour la Slovaquie. Fait anodin, le prix plafond initialement contemplé était entre 65$ et 70$ le baril, prix qui a été rejeté par la Lituanie, la Pologne et l’Estonie, puisqu’il était jugé trop élevé.

Ces restrictions ont toutefois des répercussions positives sur notre économie. Canadian Natural Resources (TSX :CNQ) vise à augmenter leur production de pétrole à 1M de baril par jour pour l’année qui s’amorce. Canadian Natural Resources est le plus grand producteur pétrolier canadien, en incluant leur capacité au niveau du gaz naturel, la croissance du boe (barrel of oil equivalent) grimpe de 56 000 par jour. Malgré que le titre du géant de l’énergie affichât un recul de 3.70% ce lundi, le titre enregistre tout de même un gain de 46.60% dans la dernière année. Suncor Energy (TSX :SU), le plus grand producteur en sable bitumineux, ne prévoyait qu’une augmentation de 10 000 boe par jour.

De l’autre côté du spectre maintenant, certains joueurs dominant dans leur industrie commencent à pointer vers de possible restructuration en fonction des nouvelles énergies. C’est le cas entre autres de BP plc (NYSE :BP), qui croit fortement à l’avenir de l’hydrogène comme carburant à faibles émissions. Le carburant, quoique moins « glamor » que l’électricité au niveau des véhicules, fait déjà tourner les têtes au niveau efficacité. Le hic cependant, est qu’il est plutôt dispendieux à produire. Comme le président de BP, Bernard Looney, l’indique, l’appui du gouvernement est crucial afin de faire compétition au pétrole conventionnel.

La compagnie indique déjà avoir créé une division spécifiquement pour l’hydrogène, avec des projets en Australie, en Europe et au Royaume-Uni. Des projets exploratoires sont également en développement en Oman et Mauritanie. Une production cible d’hydrogène pur sera même annoncée lors d’une conférence aux investisseurs le 7 février prochain, une première pour une compagnie pétrolière.

Le nouveau chef d’exploitation de l’hydrogène, Tomeka McLeod, mentionne notamment que les phases initiales visent à remplacer l’hydrogène « gris », soit un type d’hydrogène dérivé du chauffage de gaz naturel, vers un hydrogène « bleu », soit un hydrogène plus propre, lorsque les émissions polluantes sont capturées.

L’aide du gouvernement s’avère une pierre angulaire dans ces projets d’expansion de l’hydrogène. L’IRA (ou Inflation Reduction Act) récemment mis en place par le gouvernement Biden, offre notamment des crédits d’impôt aux sociétés qui s’efforcent de rendre leurs émissions neutres ou même nulles. L’IRA prévoit notamment un crédit de 3$ par kilogramme pour de l’hydrogène pur (ou « vert » qui découle d’un traitement spécifique à travers l’eau).

Il est à noter que BP a acquis en juin dernier une position minoritaire de 40.5% dans une firme australienne qui pourrait produire jusqu’à 26 gigawattheures en hydrogène « vert » et développe présentement des projets au Royaume-Uni pour une production de 1.5 gigawattheure d’hydrogène bleu et vert, d’ici 2030.

Si des mesures monétaires similaires sont adoptées de notre côté de la frontière, il serait plausible de voir des firmes déjà productrices d’hydrogène bleu, mettre les bouchées doubles afin de s’accaparer de parts de marché. Il est à se rappeler que la firme allemande Thyssenkrupp (ETR : TKA) a été choisie par Hydro-Québec afin de bâtir les installations requises pour la production d’hydrogène vert à hauteur de 88 mégawattheures. Quoique la sélection s’est effectuée en 2021, la construction sur le site établi à Varennes ne s’amorcera pas avant la fin 2023.

Il sera fort intéressant de voir l’hydrogène faire compétition à l’électricité pour les déplacements de véhicules tout genre. Elon Musk pourrait bien voir de la compétition… d’ici 2030 du moins.

Sources:

https://www.reuters.com/business/energy/bp-doubles-down-hydrogen-fuel-future-2022-12-05/#:~:text=LONDON%2C%20Dec%205%20(Reuters),develop%20the%20fuel%20to%20decarbonise.

https://apnews.com/article/russia-ukraine-zelenskyy-economy-prices-european-union-5492e005824aa1de529c8629a59e7982

https://www.bloomberg.com/news/articles/2022-11-30/canadian-oil-giant-plans-to-pump-more-crude-than-ever-this-year

https://www.cnbc.com/2021/01/19/canada-is-set-to-have-one-the-worlds-biggest-green-hydrogen-plants.html

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