Moderna : entre vaccin et manipulation boursière
Encore une fois, lundi, une compagnie pharmaceutique nous a fait l’annonce qu’elle avait potentiellement trouvé un remède contre la COVID-19. En effet, lundi, à la suite de l’annonce de Moderna Therapeutics (NASDAQ : MRNA), qu’un vaccin expérimental contre le coronavirus a montré des résultats encourageants chez huit volontaires d’âge moyen, le S&P500 s’est emballé et a clôturé en hausse de +3.15%, alors que l’entreprise elle-même a clôturé en hausse de près de 20%.
Bien évidemment, mardi, après avoir annoncé que dans le cadre d’une émission secondaire d’action, elle vendrait pour une valeur de 1,25 milliard de dollars d’actions à 76$ et que, finalement, un rapport de la publication sur la santé « Stat »[1] a souligné la nature précoce des données sur le vaccin, le titre s’est effondré de plus de 10% mardi, influençant également les marchés, le S&P500 clôturant la journée en baisse de -1.05%.
Naturellement, cela n’est pas la première fois qu’une entreprise use d’un tel stratagème. Il ne suffit que de retourner au 29 avril pour constater qu’on nous avait déjà fait le coup, avec le fameux remdesivir de Gilead Sciences (NASDAQ : GILD). À cette date, on annonçait que des essais faits sur leur remède pour combattre le coronavirus avaient été concluants.
Or, comme dans le cas de Moderna, on apprenait le lendemain que, finalement, dans le cadre d’un test multisites en Chine, publié dans The Lancet, il fut révélé que le médicament «n’était pas associé à des avantages cliniques statistiquement significatifs». Cependant, les 158 patients prenants du remdesivir (79 sous placebo) ont rapporté une récupération plus rapide, bien que les chercheurs aient déclaré que le point de données « nécessite une confirmation dans des études plus importantes ».
À la suite de cette annonce, le S&P500 a chuté de près de 1% et le titre Gilead de plus de -4.5%. De plus, depuis cette journée, l’entreprise pharmaceutique est en baisse de près de -14%, n’ayant pas été en mesure de remonter à ces derniers sommets.
En somme, je serais très surpris que ce soit la dernière entreprise pharmaceutique à nous faire le coup, donc il est et sera très important d’être prudent lors de ce genre d’annonce. Particulièrement lorsque cela implique des tests préliminaires. Prudence !
Qu’est-ce qu’une émission secondaire d’actions
Une émission secondaire est la vente de nouvelles actions ou d’actions détenues par une entreprise qui a déjà fait un premier appel public à l’épargne (PAPE). Il existe deux types d’offres secondaires. Une offre secondaire non dilutive est une vente de titres dans laquelle un ou plusieurs actionnaires importants d’une entreprise vendent la totalité ou une grande partie de leurs avoirs. Le produit de cette vente est versé aux anciens propriétaires de ces parts, et n’influe donc pas sur la firme directement. Parallèlement, une offre secondaire dilutive implique la création de nouvelles actions et leur mise en vente publique.
Tout d’abord, une émission secondaire non dilutive ne dilue pas les actions détenues par les actionnaires existants, car aucune nouvelle action n’est créée. La société émettrice pourrait ne pas en bénéficier du tout, car les actions sont proposées à la vente par des actionnaires privés, tels que des administrateurs ou d’autres initiés (tels que des sociétés de capital de risque) souhaitant diversifier leurs avoirs. Habituellement, l’augmentation des actions disponibles pour transiger permet à un plus grand nombre d’institutions de prendre des positions dans la compagnie émettrice, ce qui peut bénéficier à la liquidité de négociation des actions de la société émettrice. Ce type d’offre secondaire est courant dans les années suivant une introduction en bourse, après la fin de la période de « blocage » ou « lock-up period » en anglais. Généralement, ce délai imposé dans le but que les initiés ne vendent leurs actions trop rapidement, précipitant une chute du titre, est de 180 jours.
Ensuite, une émission secondaire dilutive est lorsqu’une entreprise crée et met sur le marché de nouvelles actions, diluant ainsi la valeur des actions existantes. Ce type d’offre secondaire se produit lorsque le conseil d’administration d’une entreprise accepte d’augmenter les actions dites « flottantes » (float en anglais) afin d’obtenir plus de capitaux propres. Lorsque le nombre d’actions en circulation augmente, cela entraîne une dilution du bénéfice par action. L’afflux de liquidités qui en résulte est utile pour atteindre les objectifs à long terme d’une entreprise ou peut être utilisé pour rembourser la dette ou financer l’expansion. D’un point de vue court terme, les analystes et actionnaires peuvent ne pas considérer l’événement comme positif.
Pour le négociant actif, ce genre d’événement peut générer une occasion d’achat ou vente à découvert. En effet, le prix d’une émission secondaire peut constituer une zone de support à court terme. Par exemple, pour évoquer un titre très populaire ces temps-ci, Shopify (NYSE : SHOP), au début du mois de mai, a approuvé une émission d’actions à 700 dollars américains. De ce fait, ce 700$US représentait un nouveau support court terme pour le titre. Donc, une position aurait pu être prise autour de 700$US, avec un stop légèrement plus bas, et comme on voit ci-dessous, la transaction aurait pu être profitable. Dans le cas contraire, si le support de 700$US n’avait pas tenu, une position de vente à découvert aurait pu être initiée.
En somme, les émissions secondaires sont des événements à surveiller lors de vos prises de position ou lors de vos recherches de titres.
Analyse de la semaine
La semaine a débuté en force lundi avec l’espoir d’un vaccin fourni par Moderna Therapeutics et par une annonce conjointe entre le trésor américain et la Réserve fédérale américaine qui confirmait que les deux entités américaines étaient prêtes à encaisser des pertes à la suite de leur programme de prêt aux entreprises.
De plus, aux côtés du président de la Réserve fédérale, Jerome Powell, Mnuchin a souligné que les données économiques des États qui commencent à rouvrir seront essentielles pour déterminer les prochaines étapes de la réponse fédérale.
Ensuite, mercredi, le retour d’un bond du trésor que l’on n’avait pas vu depuis 1986 : le bond a échéance 20 ans. En effet, émis pour la dernière fois en 1986, le Trésor ramène l’obligation à 20 ans, qui a fait ses débuts dans une enchère de 20 milliards de dollars qui a eu lieu mercredi après-midi. Cela servira principalement de moyen de financement pour le gouvernement américain, alors que les besoins d’emprunt du gouvernement ont considérablement augmenté au cours des dernières semaines en raison de la pandémie, la dette nationale s’élevant maintenant à plus de 25 T$, en hausse de 15% depuis un an.
Jeudi, la sortie du rapport de demandes de chômage nous présentait encore une fois un ajout de 2.52 millions de nouvelles demandes, alors que les États prennent de plus en plus de mesures pour remettre leurs économies en marche. Voici un graphique représentant les demandes des dernières semaines :
Finalement, il sera important de surveiller deux niveaux pour la semaine prochaine. Tout d’abord, le niveau du S&P500 qui vient d’atteindre sa moyenne mobile 200 périodes en jours, tel que présenté dans le graphique ci-dessous :
Le second niveau à surveiller sera celui des nouveaux cas, puisqu’il semble y avoir une recrudescence de ceux-ci, depuis le début du déconfinement (voir graphique ci-dessous). De plus, il est important de noter que jeudi, nous avons officiellement atteint la barre des 5 millions de cas sur la planète.
Par Nicolas Gauthier, B.A.A. profil Finance et contributeur chez DayTrader Canada
Sources :
https://www.smbtraining.com/blog/trading-a-secondary
https://blog.wealthfront.com/equity-ipo-guide/selling-stock-after-ipo/
https://www.investopedia.com/terms/s/secondaryoffering.asp
https://www.thestreet.com/investing/dow-futures-fall-gilead-treatment-intel-outlook-disappoint
https://ca.finance.yahoo.com/news/asia-stocks-advance-u-rally-213949635.html
https://www.seattletimes.com/business/moderna-early-coronavirus-vaccine-results-are-encouraging/
https://www.cnbc.com/2020/05/21/us-weekly-jobless-claims.html
https://seekingalpha.com/article/4348915-wall-street-breakfast-deficit-and-give-me-twenty
https://www.worldometers.info/coronavirus/
[1] https://www.statnews.com/
Avis et déclaration:
L’auteur de ce billet déclare ne détenir aucune position dans les titres mentionnés et de ne pas avoir l’intention d’initier une position dans les 72 prochaines heures. Cet article est une opinion et ne doit en aucun temps être considéré comme un conseil en investissement.
Le contenu de ce billet, les données financières et économiques incluant les cotes boursières ainsi que toutes analyses et interprétations de celles-ci sont fournies à titre d’information seulement et en aucun cas ne doivent être considérées comme étant une recommandation ou un conseil d’acheter, de vendre, de vendre à découvert ou poser tout autre acte envers toute valeur mobilière, tout instrument dérivé ou tout actif ou classe d’actif quelconque.
L’investissement autonome actif devrait être considéré comme une activité de nature spéculative qui de par cette nature peut comporter des risques importants pouvant entraîner des pertes significatives en capital. Un investisseur autonome actif se doit d’avoir une compréhension de sa tolérance au risque et de ses objectifs d’investissement avant de considérer l’investissement autonome actif comme activité.
DayTrader Canada et les membres de son équipe ainsi que les collaborateurs externes ne peuvent donner aucune garantie ni assurance que les transactions boursières effectuées par ses lecteurs ou clients seront profitables. De plus, les membres de l’équipe de DayTrader Canada, ses formateurs et les collaborateurs externes, ne donneront, en aucun cas durant des formations ou toutes autres activités, des recommandations d’achat ou de vente sur des instruments financiers en particulier.
DayTrader Canada, ses administrateurs, dirigeants, employés et mandataires ne seront aucunement responsables des dommages, pertes ou frais encourus à la suite de la mise en application des notions apprises dans ses formations et/ou de l’utilisation de ses services.