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Les finances des Canadiens : comme neige au soleil

Par Olivier Gélinas, Analyste Financier, Contributeur pour DayTrader Canada

Les Canadiens commencent à sentir la pression financière de leur rythme de vie effréné, gracieuseté de la pandémie des deux dernières années. La confiance des consommateurs envers la solidité de leur propre budget face aux multiples menaces semble se détériorer d’une semaine à l’autre. Malgré des affichages d’emploi disponible record, les Canadiens peinent à suivre les augmentations de coûts qui fusent de toute part.

La firme de surveillance de crédit Equifax a dévoilé en début juin de nouvelles données sur la situation financière des ménages canadiens. Les dépenses mensuelles portées sur cartes de crédit ont augmenté de 17.5% dans le premier trimestre de 2022. Ce qui pointe vers une période plus difficile pour de nombreux ménages si des balances élevées sont conservées sur ces cartes. Comme plusieurs le savent, les balances impayées des cartes de crédit peuvent porter intérêt jusqu’à 23%. De l’autre côté, la seconde firme de surveillance de dossier de crédit, TransUnion, dévoile que ces balancent ont augmentés de 9.2% au début de 2022 et de 13.8% comparativement à 2020. Un autre signal pouvant mener à la détresse financière est l’utilisation beaucoup plus courante des lignes de crédit sur valeur domiciliaire (ou HELOC en anglais). Une augmentation de 6.6% de ces outils a été notée.

Malgré ces signes initiaux de détresse financière, les Canadiens ne dérogent pas de leurs habitudes de dépenses, bien ancrées dans leur mode de vie. Les ventes au détail ont augmenté de 0.9% en avril selon Statistiques Canada. Cette augmentation est alimentée à la fois par l’inflation, mais également l’excès de confiance des consommateurs envers leur situation financière. L’engouement est bien réel suivant les confinements, toutefois le budget de plusieurs ne sera pas en mesure de maintenir la cadence.

Quoique la situation n’a rien de nouveau, le taux d’endettement des Canadiens a atteint 180% au premier trimestre. Cette mesure étroitement surveillée frôlait le même niveau à la fin 2019. La différence avec 2019 est que la solidité des finances des ménages est beaucoup plus précaire. Pour chaque dollar gagné, 1.80$ est dû au niveau de leurs dettes, et ce niveau ne fait que croître avec les activités des derniers mois au niveau de l’immobilier. Prendre de nouveaux engagements dans un environnement où la Banque du Canada augmente ses taux d’intérêt n’est pas une situation idéale.

L’endettement élevé des ménages peut en bonne partie s’expliquer avec l’engouement d’être propriétaire de son domicile. Selon des données de la Banque du Canada, plus de 25% des emprunteurs en 2021 et 2022 ont des ratios prêt-revenu au-dessus de la marque des 450%. A titre illustratif, il s’agirait de contracter un prêt de 315 000$ pour un revenu annuel de 70 000$. La Banque voit également la tendance des acheteurs de faire recourt à des termes d’hypothèques plus longs afin de diminuer leur paiement mensuel et ainsi limiter les dommages sur leurs liquidités discrétionnaires.

La Banque du Canada a augmenté le taux directeur de 1.25% depuis le début de l’année, notamment afin de calmer les dépenses des ménages et diminuer la progression de l’inflation. La prochaine hausse de taux anticipée à la mi-juillet est de 75 bps, ou 0.75%. Il s’agirait de la plus grande hausse de taux depuis 1994, prouvant la situation instable dans laquelle l’économie se trouve aujourd’hui. Ces augmentations ajouteront au fardeau de dettes des ménages ayant acquis une propriété potentiellement surévaluée, en plus de rendre difficile l’accès au marché pour les nouveaux acheteurs.

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En réaction à la détérioration de leurs finances personnelles, les ménages se tournent vers certaines solutions à portée de main (ou de portefeuille) afin d’alléger leurs dépenses. Pour certains, des coupures drastiques ont dû être faites. Les vacances seront moins loin qu’initialement prévues et de plus courte durée. D’autres optent plutôt pour les marques maison lorsque le temps est venu de remplir le panier d’épicerie. Des réductions de sorties au restaurant et d’activités diverses sont également prévues pour plusieurs, rien pour améliorer la situation fragile de nos restaurateurs. Les annulations d’inscription au centre de conditionnement ainsi que des réductions de forfaits télévisions ou cellulaires sont également des options envisagées.

Les marchés boursiers, et même celui de la cryptomonnaie, ne sont guère encourageants lorsqu’un individu tente de se réconforter sur la situation de l’économie. Comme discuté la semaine dernière, le marché a fait son entrée en bear market, pointant vers un délaissement des titres ou stratégies risqués afin de laisser place aux refuges de valeur ou encore de retrait tout simplement.  

La ministre des Finances, Chrystia Freeland, dévoila lors d’un discours la semaine dernière le plan du Gouvernement du Canada afin d’aider les ménages canadiens à faire face à l’inflation. Le plan dévoilé fait notamment mention d’allocations pour les travailleurs, d’augmentation de la pension de sécurité vieillesse et d’un paiement ponctuel de 500$ à ceux ayant de la difficulté à trouver un loyer dans leurs moyens. Les coûts des services de garde sont également en jeu, tout comme une assurance dentaire gratuite offerte aux ménages gagnant 90 000$ ou moins, dès 2025. Des mesures dont plusieurs qualifient d’inutile, voyant le besoin criant de mesures immédiates et efficaces en réponse aux aléas de l’économie.

Les différents acteurs de l’économie sont donc aux prises avec plusieurs vecteurs agissant contre leur bien-être et portefeuille et aucune formule magique n’existe encore afin de régler le tout. Les cycles boursiers, même les plus douloureux, ont éventuellement permis d’excellents rendements sur le long terme. Les périodes inflationnistes sont habituellement temporaires, toutefois leur impact ne peut qu’être encaissé par les ménages en attendant de meilleurs jours. Comme quoi, la patience est réellement une vertu.

Sources :

https://www.bnnbloomberg.ca/canadian-shoppers-show-resiliency-as-retail-sales-jump-1.1781716

https://financialpost.com/executive/executive-summary/posthaste-while-bank-of-canada-signals-more-hikes-to-come-canadians-rack-up-their-credit-cards

https://www.ledevoir.com/economie/720897/la-banque-du-canada-redoute-les-effets-de-l-endettement-des-menages

https://financialpost.com/executive/executive-summary/posthaste-canadians-are-losing-confidence-in-their-personal-finances

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