Jamais deux sans trois

Par Olivier Gélinas, Analyste Financier, Contributeur pour DayTrader Canada

Deux nouvelles sont tombées sur le marché plus tôt cette semaine, d’un joueur canadien bien connu dans le milieu de la technologie. Constellation Software (TSX :CSU) a, une fois de plus, surpris les marchés, avec une annonce 2-en-1, chose peu commune pour le milieu. Constellation pourra ajouter un nom américain à sa liste de « victime ».

La compagnie basée à Toronto a fait savoir aux marchés ce lundi que, malgré un environnement économique plus difficile, l’industrie des technologies est loin d’être sur pause. Constellation, qui fait en fait maintenant une raison d’être, annonça qu’elle acquérait les actions de WideOrbit inc. WideOrbit est une compagnie américaine, basée en Californie qui œuvre depuis 1999 dans le domaine de la publicité corporative, devient une prolongation de Constellation.

WideOrbit deviendrait donc une filiale, détenue à part entière par la filiale Lumine Group inc., détenue par Constellation. Lumine Group est en réalité un acquéreur de sociétés œuvrant en communications et logiciels multimédias. La filiale, de par sa spécialité, permet aux entreprises acquises sous Constellation de mieux se développer et de profiter de l‘expertise du groupe.

Quoique le prix d’achat demeure inconnu en date d’aujourd’hui, WideOrbit enregistrait tout de même des revenus de 167M USD en 2021, et emploi actuellement près de 450 employés. La transaction serait financée à la fois par les fonds de Constellation et d’un partenaire bancaire. Le prix d’achat serait un mix d’argent et d’échange d’actions. Nous reviendrons sur ce point dans quelques instants. Le titre de Constellation a répondu à l’annonce avec un gain de 2.63% à la fermeture de la journée de lundi.

La croissance non organique de Constellation se poursuit, après avoir acquis Allscripts Healthcare Solutions en mai 2022 par le biais de leur filiale Harris Computer Corporation, se spécialisant dans les soins, l’éducation, la gestion d’immeubles et services utilitaires. Avant celle-ci, nous avions celle de SSP Limited en février 2021, ou encore celle de Salvia Développement SAS en 2019, précédé de MDS Global Ltd… et l’histoire s’enchaîne.

La particularité de cette dernière annonce avec WideOrbit, est que la société a également déposé un prospectus préliminaire auprès des agences règlementaires du Canadian Securities, afin de réaliser un spin-off de Lumine Group, ce qui inclurait la nouvellement acquise WideOrbit. La nouvelle entité demeurerait la propriété de Constellation, mais offrirait toutefois 13.83% des actions de Lumine au grand public. Les actionnaires actuels recevraient donc un dividende en argent, en plus d’un prorata d’actions de la nouvelle entité. Toutefois, cette nouvelle entité demeure en suspens, jusqu’à l’approbation par les autorités du prospectus déposé lundi.

Le raisonnement derrière ce spin-off, venant de David Nyland, CEO de Lumine Group, est la culmination du cheminement des dernières années et des acquisitions dans le secteur des communications. Alors que le focus avait été mis sur l’acquisition de parts de marchés, WideOrbit vient sceller l’entrée en bourse de cette nouvelle entité, qui se transigerait sur le TSX Venture, dès l’an prochain.

Cette situation ramène également sur le sujet la différence entre certaines réorganisations corporatives populaires, soit le spin-off, le split-off et le carve-out. Dans le cas d’un spin-off, la compagnie mère distribue les actions de la nouvelle entité créée aux actionnaires existants. Comme il est le cas avec Constellation, elle distribuera près de 14% de la nouvelle société à ses actionnaires, à une date butoir à être identifiée. Dans ce scénario, la compagnie mère détient toute la latitude de distribuer le prorata des actions de sa nouvelle compagnie. Comme Lumine demeurera vraisemblablement sous la gestion de Constellation, cette dernière conserve sa majorité. Cela peut également être une indication de la confiance qu’elle a en son nouveau fleuron.

Lorsqu’une compagnie opte plutôt pour un split-off, un choix est à faire au niveau de l’actionnaire. La compagnie mère rend disponible à ses actionnaires des actions de la nouvelle entité, mais ce dernier doit cependant échanger à un taux préidentifié, les actions qu’il détient dans la compagnie mère, au profit de la nouvelle société. Avec cette option, le pourcentage de détention de la nouvelle entité reste inconnu, jusqu’à la date limite des échanges.

Le dernier scénario fait office d’un carve-out, soit lorsqu’une compagnie décide de rendre public un sous-segment de ses activités. Une IPO est réalisée afin de vendre les actions de la nouvelle entité. La compagnie mère peut décider de conserver une part des actions et de continuer le développement de la société avec le nouveau groupe d’investisseur.

Fait intéressant, les compagnies qui ont vu le jour sous un format de spin-off ont souvent vu leur performance primée comparativement à l’indice S&P 500. L’indice se transigeant sous le ticker CSD, sur le NYSE Arca, soit une branche du NYSE où les actions et options se transigent, suit les compagnies spécifiquement de spin-off et a surpassé la performance du S&P jusqu’en 2019. Après quoi, la venue de la pandémie, du boom économique et subséquemment, du recul notable de 2022, a quelque peu fait dérailler les résultats empiriques.

De retour à Constellation maintenant, malgré la feuille de route impressionnante qu’ils détiennent, des doutes planent toujours quant à la viabilité de l’introduction de nouvelles entités en bourse. Nous pouvons prendre en exemple le récemment listé Grindr (NYSE :GRND), qui faisait son entrée via une SPAC, a gagné 214% lors de sa première journée, avant de perdre 82% de son sommet de 36.50$ en quelques jours. Toutefois, Constellation s’en est créé une vocation que de regrouper dans leurs divers « portefeuilles », des entités à opérations similaires, et de les amener à un niveau supérieur.

Au mois de septembre dernier, la compagnie possédait 665M USD en argent, et enregistrait des revenus de 4.77 milliards, comparativement aux 3.72 milliards de l’an dernier à pareille date. En prenant en considération que près de 72% des revenus proviennent de créneaux récurrents, il est naturel de voir la société poursuivre une stratégie de croissance agressive, et ce, même en marché baissier, à l’aube d’une récession.

Les multiples auxquels les entreprises se vendent aujourd’hui sont largement inférieurs à ce qui se faisait en 2021, incitant les grands joueurs qui ont su être patients jusqu’à présent, à sortir enfin quelques billets de leurs portefeuilles. Il ne serait pas surprenant que d’autres acquisitions soient dans les cartes pour notre compagnie de technologie canadienne.

Sources:

https://www.csisoftware.com/category/press-releases/2022/12/12/constellation-software-inc.-and-lumine-group-inc.-reach-agreement-to-acquire-wideorbit-inc.-and-file-preliminary-prospectus-in-connection-with-proposed-lumine-group-spin-out

https://ca.finance.yahoo.com/news/next-100-bagger-constellation-software-173000965.html

https://www.investopedia.com/articles/investing/090715/comparing-spinoffs-splitoffs-and-carveouts.asp#:~:text=A%20spin%2Doff%20distributes%20shares,subsidiary%20and%20the%20parent%20company.

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